Dialogue d’André Tarassi avec un athée (extrait) – Mars 2008



Je regrette que l'objectivité ne vous ait pas incité à proposer (sur votre site) autant d'opinions contraires 

Je regrette pour ma part que vous prétendiez ne pas comprendre ce qui se joue dans l'action du CICNS. Notre association s'est créée parce que l'objectivité était absente du débat sur les sectes en France (et par la suite en Belgique et en Suisse qui ont cru bon d'adopter les méthodes françaises). Notre son de cloche, faible parce que peu relayé par les médias et parce que minoritaire, n'est qu'une tentative d'équilibrer l'assaut de la pensée unique. Il est donc, bien entendu, exclu que nous reprenions les lieux communs les plus répandus et que vous n'hésitez d'ailleurs pas à nous énoncer dans votre texte, comme si vous n'avions jamais subi ce point de vue.

Les sectes... cherchent à harponner de plus en plus de croyants... Leur techniques est bien...rodée... elles trompent... c’est une « escroquerie morale et intellectuelle » …par tout un arsenal..." etc. 

Mais de quoi parlons-nous ? Connaissez-vous réellement (c'est-à-dire au-delà de votre imaginaire) un groupe terroriste près de chez vous qui corresponde à cette lancinante liste irrationnelle (un comble chez quelqu'un comme vous !) qui a fait son travail de "lavage de cerveau" au point que tout le monde, de manière hallucinatoire, finit par voir des sectes partout, connaissant le langage par coeur pour les dénoncer, évoquant une menace obscure et invisible ? 
Que croyez-vous donc nous apprendre (que nous n'aurions déjà lu un million de fois avec un pincement au coeur) avec cette liste pathétique d'accusations sans discernement qui ont provoqué des dégâts innombrables par méprises dans nos populations et le plus souvent inconnus du grand public ? 
Avez-vous pris la peine d'écouter aussi ceux qui témoignent de la machine judiciaire aveugle qui écrase la vie de personnes innocentes parce que tel juge ou tel procureur a récité la même litanie à des personnes qui n'auraient jamais du la subir ? 
Je ne vois pas beaucoup "d'esprit critique" dans votre manière de juger en vrac les minorités spirituelles sur la base des mantras médiatiques que vous répétez comme tous les dévôts de la lutte anti-sectes. 
Quel exemple pensez-vous donner de cet esprit critique à des personnes qui, comme nous, sur le terrain quotidiennement, voient les effets de cette pensée unique, monolithique, éléphantesque dans un magasin de porcelaine ? 
Croyez-vous vraiment que nous allons souscrire à cette terrifiante manière de voir les choses comme si vous étiez tout à coup celui que nous attendions pour comprendre quelque chose qui nous aurait échappé ? 
Le combat contre les sectes est "une escroquerie morale et intellectuelle" et l'histoire, avec le temps qu'il faudra pour qu'elle prenne le recul nécessaire, le dira certainement. 
Pour l'instant, permettez que nous poursuivions notre tâche difficile en ravalant notre tristesse à lire ce à quoi se consacrent les personnes intelligentes.

Il est vrai que, personnellement, ce ne sont QUE les visites de "Témoins de Jéhovah" (et non des membres de "nouvelles spiritualités" (que je ne connais mal que par des textes) qui m'ont "dérangé" par leur insistance à vouloir me faire accepter leur vérité

Je pense que vous êtes conscient que l'insistance à faire accepter une vérité n'est pas une dérive plus grande du côté "sectes" que du côté dit "anti-sectes". Il y a dans votre manière de soutenir la lutte anti-sectes un excès du même ordre que ce que vous dénoncez (malgré votre relative ignorance du paysage des minorités spirituelles, comme vous le reconnaissez en parlant du fait que vous ne connaissez guère que les Témoins de Jéhovah (+ ce que vous disent les journaux)) . Une telle attitude est, elle, un véritable fléau contrairement à cet hypothétique fléau social indistinct que constitueraient "les sectes".

Je suis partisan, je vous le rappelle, de conditions éducatives et politiques permettant le libre choix des convictions philosophiques OU religieuses, en connaissance de cause, et donc quelles qu'elles soient, tant qu'elles respectent la dignité de l'être humain et des valeurs humanistes universelles.

Vous pouvez donc adhérer au CICNS qui soutient ce même libre choix, non respecté actuellement à cause de cette phobie collective irrationnelle qui s'appuie sur deux ou trois événements pour justifier une campagne de nettoyage "au karcher" dont les ressorts sont bien moins "humanistes" que vous ne semblez vouloir le croire. Vous ne seriez pas la première personne sincère à s'engager dans une cause mauvaise avec de bons principes (on peut vouloir "mettre fin aux dérives" mais sans occulter la propre dérive qui guette tout croisé en croisade contre une autre croisade. C'est ce que nous dénonçons fermement et votre "point de vue" que vous aimeriez nous faire comprendre ne nous est pas étranger, il est simplement décalé par rapport à la réalité des "faits").
Je crois que tant que vous ne réalisez pas que nos points de vue ne se rejoindront pas sans une reconnaissance de TOUTES les dérives, le dialogue sera stérile.

Je reconnais que "l'excès dans la manière de soutenir la lutte anti-sectes" n'est pas contestable, y compris de ma part, mais bien involontairement. Je persiste pourtant à penser que cet excès n'exprime, maladroitement, que l'inquiétude vis-à-vis de dérives sectaires, souvent injustifiées actuellement, mais théoriquement possibles dans la mesure où elles procèdent de l'irrationnel. La seule issue, pour les sectes et surtout pour les "nouvelles spiritualités", ne consisterait-elle pas à se rendre réellement "transparentes" ? (…) Les nouvelles spiritualités se sont-elles suffisamment distinguées des sectes ? Je lirai votre réponse avec intérêt.

J'ose espérer que les excès de la lutte sont "involontaires", car quelles que soient les erreurs qu'un groupe ou un individu puissent commettre, le pouvoir véritable reste entre les mains des puissants, des gouvernements, des médias, et les erreurs de ces derniers sont bien plus lourdes de ce fait. La sanction injuste (parce que procédant par amalgame) d'un État contre ces minorités a des effets bien plus graves et étendus que les méfaits de quelques personnes mal intentionnées, malhonnêtes ou maladroites ...que la Justice doit pouvoir condamner sans créer de "lois d'exception" ou de campagnes de discriminations aux effets durables et quasiment irréversibles.
Vous soulignez très justement l'impasse provoquée par le traitement médiatique et judiciaire desdites sectes : le silence est interprété comme un manque de transparence et la parole comme du prosélytisme. 
Nous pensons cependant qu'il est nécessaire de créer un observatoire indépendant des minorités spirituelles (cliquer sur le lien pour lire notre proposition faite au gouvernement) constitué de personnalités de disciplines diverses et qui viendrait remplacer les activistes anti-sectes et autres officines d'État qui ne puisent qu'aux sources de cette pulsion anti-religieuse que l'on veut faire passer pour une oeuvre de salubrité publique.
Votre dernière question, sur la distinction éventuelle (et rarement envisagée) entre "les nouvelles spiritualités" et les sectes, trouvera sa réponse officielle à travers un tel observatoire impartial. 
Du point de vue de notre association, nous avons connaissance de nombreuses minorités spirituelles saines, dont une partie doit néanmoins subir les mêmes accusations et rumeurs que les autres (quand ce n'est pas des peines de prison, nous sommes actuellement en contact avec un psychiatre qui vient de faire quatre mois de prison sur dénonciation calomnieuse des activistes anti-sectes locaux, voir son témoignage vidéo ici). Nous avons connaissance de personnes encore plus nombreuses qui bénéficient de leur contact avec ces groupes spirituels. On peut toujours penser que ce bénéfice est dérisoire ou que ces personnes auraient été mieux inspirées ailleurs, mais ce sont là des jugements de valeur qui ne laissent en tous cas pas la liberté à chaque individu de trouver ses chemins de croissance. Pour ma part, je ne doute pas, par exemple, que les erreurs (comme les succès) puissent conduire à des prises de conscience salutaires, même pour ce qui concerne les illusions spirituelles, et qu'il n'y a souvent pas de raccourcis possibles. Ce n'est pas parce que vous avez réalisé quelque chose d'important dans votre vie que tout le monde peut l'entendre de la même manière. Laissons donc la possibilité aux êtres humains de suivre leur chemin en leur donnant tous les outils nécessaires mais sans décider a priori de faire un tri partisan de ces mêmes outils.

Dialogue d’André Tarassi avec un sceptique (octobre 2009) (extrait)

 

Je découvre votre site et je trouve certaines de vos remarques et articles pertinents ! Par contre, vous avez un parti pris très clair contre toute autorité que vous appellez "ANTI-SECTES"! A force de voir trop d'anti- quelque chose...., vous devenez vous même anti quelque chose ! Et toujours du même coté: de ceux que vous appellez "LA MINORITE SPIRITUELLE"! Où sont vos critiques sur les minorités spirituelles ? Vous croyez réellement qu'il n'y pas de critiques à faire? L'objectivité s'adresse à tout le monde y compris vos minorités spirituelles. Si vous vous servez de la raison pour faire vos analyses et remarques sur ceux que vous n'aimez pas, servez vous aussi pour ceux que vous pourriez éventuellement aimer ou du moins, que vous ne critiquez pas et défendez car il y a vraiment à dire. Il y a du bon et du mauvais et très probablement des excès chez vos opposants et vous croyez qu'il y a pas d'abus et des excès dans vos minorités spirituelles ?


Merci pour votre commentaire sur notre action. La réponse à votre question principale est simple : l'équipe du CICNS a conscience de dérives possibles, nous l'avons écrit sur notre site (http://www.cicns.net/Position_CICNS_Abus.htm). Mais nous n'avons pas pour fonction de les commenter davantage alors que les abus sont déjà presque quotidiennement au premier plan de la scène médiatique et politique, souvent grossis et instrumentalisés. Le conditionnement médiatique de la population est tel que la plupart des gens à qui nous parlons ne lisent ou n'entendent même pas ce que nous disons vraiment, une partie d'entre eux croient même que nous sommes une association  antisectes ! Nous avons donc mentionné que nous ne sommes pas dupes, mais nous faisons un travail  beaucoup plus rare , relativement confidentiel à l'heure actuelle,  et qui nous demande assez de temps pour que nous n'en passions pas plus à parler de dérives qui devraient être traitées sur un autre plan, celui de la nature humaine et de ses instincts. À ce niveau-là, bien sûr, il ne s'agit plus de limiter la dérive aux sectes, mais au genre humain et il est probable que les hommes politiques ou les militants antisectes se retrouvent finalement dans ce panier avec les autres.  Mais il y a encore du chemin avant d'en arriver là.

 

André Tarassi est né en 1961, il est le fondateur du CICNS. Chercheur indépendant, il étudie les Nouvelles Spiritualités depuis 25 ans. Il a étudié le journalisme et la télévision aux États-Unis.  Il a publié, sous un autre nom, plusieurs ouvrages sur la démarche spirituelle.  

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