Liberté de conscience ?

par le CICNS

Alors que notre société française est confrontée à des tiraillements internes dans son clivage le plus profond, religion / laïcité, certaines expressions sont utilisées de manière tout à fait tendancieuse et leur sens véritable s’en trouve dénaturé.

La liberté de conscience, par exemple, qui signifie la liberté de faire un choix, dans le cadre de la loi, mais en conscience et sans influence d’un dogme, qu’il soit religieux extrémiste ou laïciste, a pris un tout autre sens dans certains débats actuels.

En latin, liber signifie libre, sans chaînes, sans entraves. On dit que la liberté est l'acte d'un sujet libre, capable de choisir, de décréter par sa raison ou sa foi les lois auxquelles il obéira. Cette liberté, si elle doit s’exercer dans le cadre de la loi collective, ne devrait pas être contrôlée ou réprimée pour d’autres raisons que l’intérêt collectif (comme la lutte contre la criminalité).

Il est pourtant évident aujourd’hui que chacun se bat pour une idée de l’intérêt collectif qui s’éloigne beaucoup de la liberté de conscience, telle que définie plus haut, et que cela réduit considérablement les libertés individuelles.

Le cas des minorités spirituelles en France :

Quand un individu souhaite s’associer à un groupe à vocation spirituelle, même minoritaire, il exerce sa liberté de conscience. On ne peut lui retirer sa capacité à choisir avec l’argument fallacieux qu’il ne serait, en fait, pas capable de choisir, (c’est un argument clé des anti-sectes : les adeptes de minorités spirituelles sont bons à mettre sous tutelle). On ne peut non plus lui interdire de quitter ce groupe pour la même raison (mais cela indique que, s’il avait le choix d’y entrer librement et le choix d’en sortir librement, il n’y a pas de délit de part et d’autre de cette association temporaire). On ne peut surtout pas invoquer le caractère « étrange », « farfelu » ou « incompréhensible » du groupe en question pour justifier que cet individu n’avait pas « toute sa tête » au moment de son choix, car alors la liberté de conscience est réduite à une liberté « dans le cadre des croyances majoritaires » ou de la croyance de celui qui juge le choix d’un autre. On ne peut pas user du mot « dangereux » à tout bout de champ chaque fois que ce choix conscient s’exerce, et cela parce que nous aurions la certitude que le choix de l’autre, parce qu’il est original, serait une menace. On ne peut non plus lui retirer le fait que son choix s’est produit dans cette liberté de conscience et lui inculquer ensuite l’idée qu’il aurait le droit de s’en plaindre parce qu’il n’aurait pas réellement eu cette liberté.

La liberté de conscience inclut donc également la possibilité que cet individu se trompe dans son choix. La liberté de se tromper fait partie de la liberté de conscience, elle fait partie de l’apprentissage de la vie. Il ne s’agit pas d’empêcher les gens de se tromper, bataille utopique, sans quoi la lutte serait âpre, surtout si l’on considère que ceux qui veulent empêcher les autres de se tromper… se trompent peut-être aussi.

L’expression liberté de conscience finit donc par refléter les différentes perceptions de la liberté de ceux qui l’utilisent. Certaines sont des manipulations grossières qui ne sont là ni pour défendre l’intérêt de l’individu ni pour l’intérêt collectif, mais pour faire triompher une perception de la vie ou des intérêts cachés, généralement politiques ou idéologiques.  

Un catholique parle de conscience erronée. Selon l'enseignement de l'Église, dans la situation de l'homme après la chute d’Adam, une telle conscience ne pourrait, en fait, être atteinte qu'avec l'aide de la révélation divine. Ce qui a conduit un groupe catholique à demander le retrait d'un sujet du bac de juin 2005, en utilisant l’expression liberté de conscience, parce que ce devoir demandait aux étudiants de dégager les arguments en faveur de l’avortement. La liberté de conscience ne désigne plus alors la liberté de faire un choix mais la nécessité d'imposer un choix unique qui serait d’inspiration divine. Les minorités spirituelles sont toutes exclues de cette inspiration puisqu’elles ne se réfèrent pas au texte fondateur.

Pour les laïques, il ne peut y avoir de liberté religieuse et à fortiori de liberté de conscience hors d'un État laïque, c'est-à-dire respectueux du pluralisme des convictions de ses citoyens. Nous pouvons constater que l’intention est bonne mais qu’elle n’est pas du tout présente dans les actes. Les minorités spirituelles sont dénoncées comme des causeurs de trouble ou des repaires de criminels, qu’elles ne sont pas.

Pour les minorités spirituelles, leurs croyances et leurs actions doivent être respectées et ne pas être systématiquement recadrées ou réprimées par la pensée unique.

Peut-il exister une véritable liberté de conscience dans ces conflits ?

La France est un triste exemple de répression et de vues étroites qui semble indiquer que l’histoire n’enseigne rien car ce qui se produit aujourd’hui, s’est produit de la même manière des centaines de fois dans le passé. On peut bien ériger des monuments à la gloire des défenseurs des libertés, si c’est pour les pourfendre l’instant d’après en édictant des lois liberticides et en soutenant des chasses aux sorcières, nous vivons dans le mensonge.

Certains s’en arrangent volontiers, pas le CICNS.

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