Guyana

Un faux suicide collectif à Jonestown ?

Le 18 novembre 1978, 914 personnes sont retrouvées mortes à Jonestown au Guyana (ancienne Guyanne Britannique, près du Vénézuela). 

On parle d'empoisonnement, de suicide collectif, de massacre. Cet événement constitue le premier traumatisme collectif qui servira de fondation à la campagne antisectes mondiale qui se mit en branle à cette époque. La lumière n'a jamais été complètement faite publiquement sur cette affaire. Les documents dévoilés en 1997 ont pourtant fait l'effet d'une bombe, pour ceux qui ont pu les lire...

Par Thomas G. Whittle et Jan Thorpe

 


En mars 1997, le FBI annonça qu’il rendait publique, pour la première fois, sous couvert du « Freedom of information act » (décret pour la liberté de l’information), les 39 000 pages encore inconnues qui concernaient Jonestown, le temple du peuple et toutes affaires associées 1

Le FBI fut contraint de diffuser les documents à cause de cette requête FOIA datant de 1993 et initiée par le magazine Freedom.  Ces documents publiés, les révélations au sujet du massacre de Jonestown en 1978 et l’assassinat du député Leo Ryan firent l'effet d'une bombe.

Contrairement à ce qui est généralement rapporté par les médias, les documents du FBI désignent le « temple du peuple » comme une congrégation religieuse d’importance. Des citations de personnalités politiques comme les sénateurs Walter Mondale, Hubert Humphrey, Henry Jackson, Sam Ervin Jr., Warren Magnuson, Mike Gravel, le député Philip Burton, Ron Dellurns, Don Edwards, Bella Abszug et Patsy Mink démontrent qu’il existait en fait, au départ, un soutien massif et quasi officiel pour cette organisation. 

Jane Fonda écrivit, elle-même, à Jim Jones, le leader : « Je suis une participante active de votre congrégation, non seulement pour moi-même mais pour mes deux enfants avec lesquels j’aimerais partager cette expérience ». Les documents présentent également Jim Jones, comme un pasteur respecté des « disciples du Christ », l’église protestante de l’ancien président Lyndon Johnson et de millions d’américains à l’époque. Ils montrent également que la congrégation subit une longue période de harcèlement, de surveillance et d’infiltrations pour les besoins de la CIA, allant en s'intensifiant quand les bureaux de la congrégation, à l’origine basée en Indiana, se déplacèrent à Guyana.

En 1977 et 1978, des menaces anonymes furent adressées au temple du Peuple, accompagnées d’actes de violence occasionnels contre ses membres. C’est à la fin de 1977, que le député Leo Ryan subit des pressions pour aller visiter Jonestown, pressions qui s’accentuèrent jusqu’à ce qu’il accepte d’y aller. Parmi ceux qui le poussèrent à agir contre la « secte », il y avait la psychologue Margaret Singer (ardente antisectes collaboratrice du CAN, sorte d'UNADFI américaine) ainsi que Tim Stoen, un ancien assistant de Jim Jones qui avait des liens avec la CIA.  

Le 31 juillet 1980, plus de 20 mois après que Leo Ryan ait été tué lors du massacre de 1978, ses cinq enfants préparèrent une action en justice à la suite d’une importante enquête sur les causes de la mort de leur père. On pouvait lire dans l’accusation qu’il y avait eu une « infiltration de la communauté de Jonestown par des agents de la CIA » et que « ces agents travaillaient dans le cadre du programme MK-Ultra  (Des documents de la CIA ont confirmé que des expériences avaient été conduites sur des prisonniers à Vacaville pour le programme MK-Ultra. Le but de ces tests était de découvrir les effets de la drogue et du stress afin de déterminer à quel stade des individus devenaient aptes à suivre des ordres aveuglément. Selon le Dr Lawrence T. Clanon, directeur de Vacaville, la CIA voulait savoir si ces drogues pouvaient être utilisées dans les interrogatoires et pour gagner la coopération des gens). La communauté de Jonestown aurait donc été utilisée à cet effet et «des quantités massives de drogues utilisées par ce programme ont été découvertes à Jonestown après la tragédie du 18 novembre 1978 ».

De nombreuses personnes perdirent la vie le 18 novembre 1978 et le Dr C Leslie Mootoo (alors responsable médical à Guyana), affirma que, « dans la majorité des cas, il s’agissait bien de meurtres et pas de suicides ». Le Dr Mootoo, premier médecin à être arrivé sur les lieux, et considéré comme le meilleur de la région, déclara au magazine Freedom qu’ils étaient « morts par injection de cyanure ». Après 32 heures de travail sans pause dans la chaleur et les corps en décomposition, le Dr Mootoo finit par abandonner. 187 corps avaient alors été diagnostiqués par ses soins et son équipe comme morts par injection. La plupart avaient reçu l’injection dans des parties du corps qu’elles n’auraient pas pu atteindre d’elles-mêmes, entre les épaules ou au dos d’un bras. « Ceux qui ont fait les injections savaient ce qu’ils faisaient ! » déclara le docteur. De nombreux autres avaient reçu une balle dans la tête.

Charles Huff, un béret vert des forces spéciales au Panama, faisait partie des premiers militaires sur les lieux après le massacre. Il déclara : « Nous avons vu de nombreuses blessures par balles et par flèches ». Huff ajouta que ceux qui avaient été tués par balles ou par flèches semblaient courir vers la jungle qui entourait Jonestown. Corroborant les informations du Dr Mootoo, Huff déclara que ceux qui n’avaient pas été abattus par balles ou par flèches, avaient reçu des injections entre les épaules. Les tueurs avaient fui avant l’arrivée de Huff et de ses troupes.  

Le colonel de l'Air Force L Fletcher Prouty déclara, lui, qu’il existait des preuves de l’implication de forces plus importantes sur le lieu de l’opération : « Le chef du personnel (JCS) avait préparé des centaines de « body bags », alors qu’on n’en garde jamais autant en un seul endroit. Il n’y avait aucune raison d’agir ainsi à moins d’avoir connaissance de qui allait se passer. Cela démontre que tout était prémédité ». 

20 ans après la mort du député Leo Ryan, l’Amérique attend toujours l’explication définitive sur les questions non résolues au sujet de cette tragédie. Tous les documents et enregistrements de toutes les administrations devraient être publiées entièrement. Seulement alors, toute la vérité pourra-t-elle être révélée à tout le monde.

Par la suite, d’autres personnes présentes sur les lieux ont révélé que tous les corps étaient allongés sur le ventre (les photos diffusées en sont d’ailleurs la preuve), parfois en rang et qu’ils n’indiquaient pas la position de personnes ayant agonisé à cause d’une prise de poison. D’autre part, comme dans le cas d'autres prétendus suicides collectifs, ils ont retrouvé dans certaines maisons, des préparatifs d’anniversaire pour le soir indiquant qu’il ne pouvait pas y avoir eu de projet de suicides de longue date dans ces familles.

Conclusion du CICNS : En étudiant les divers documents de cette affaire tragique, il n'y a aucun doute que les dérives ont eu lieu de tous côtés. De tous les événements qui ont servi de tremplin à la campagne antisectes mondiale, celui-ci fut le premier et le plus traumatisant pour la population. Il est flagrant, que les grandes affaires (Waco, OTS) ont en commun de ne jamais avoir été élucidées et que les enquêtes sont remplies de bévues et de faux-pas incroyables qui n'ont jamais empêché les raccourcis médiatiques et servent encore aujourd'hui de résumés simplistes.

http://foia.fbi.gov/foiaindex/jonestown.htm (résumé sélectif du document officiel)

 

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