Rapport 2009 de la MIVILUDESPoint de vue
et commentaires du CICNS « L’Assemblée est
parvenue à la conclusion qu’il n’est pas nécessaire de définir ce que
sont les sectes, ni de décider si elles sont ou non une religion.
Cependant les groupes désignés sous ce nom suscitent une certaine
inquiétude (…) et cela doit être pris en considération (…)
Ceci dit, rien n’empêche que, dans leur champ de compétences, les
sociologues des religions ne poursuivent cette réflexion intéressante
engagée depuis près de trente ans » p. 19 du rapport.
Efficacité de la MIVILUDES ? Le
mot qui « vient à l’esprit »
de Georges Fenech, Président de la MIVILUDES, dès les premières
lignes de son rapport, c’est « efficacité ».
Nous ne savons pas à quoi il fait référence : est-ce que
les
assauts de la MIVILUDES sur des communautés comme le Moulin des
Vallées, sans cadre légal, sans respect des libertés
individuelles, sans raison, en un mot, sont une action efficace ?
Est-ce que la création d’une
liste noire de sectes en France,
déguisée sous le terme « référentiel », est une action efficace,
malgré les évidentes et légitimes critiques de telles listes dans le
passé ?
Les coûteuses visites hivernales de M. Fenech dans les îles d’Outre-Mer,
soupçonnées d’être « plus perméables aux croyances superstitieuses »,
sont-elles des actions efficaces ? Est-ce que la stigmatisation
croissante et tous azimuts des minorités spirituelles, alors que la
MIVILUDES était censée éviter les discriminations en luttant contre
les « dérives » réelles et non contre les « sectes », est efficace ?
L’augmentation de l’arsenal antisectes alors que l’existence du fléau
que constitueraient les minorités spirituelles et thérapeutiques est
démentie par les chiffres, est-elle une action efficace ? Les
interrogations sont nombreuses et l’efficacité d’une telle structure
semble donc nulle.
«La
Miviludes a conçu un guide pratique de la protection de l’enfance
face aux dérives sectaires qui verra le jour cette année
». Nous craignons le pire. « La protection de l’enfance » est un
thème porteur qui pourrait être légitime sous la responsabilité d’une
autre structure que la MIVILUDES laquelle a démontré dans le passé sa
manipulation des chiffres pour alarmer les populations, son
intrusion dans les libertés individuelles et en particulier dans les choix
éducatifs légaux des parents (qu'elle souhaite contrôler). La section consacrée aux mineurs est pleine de
sous-entendus (rien n’est étayé) qui viennent appuyer une sorte d'intuition
de la MIVILUDES que les minorités spirituelles seraient un danger
pour les enfants.
« C’est
au Conseil de l’Europe que se met en place l’idée d’un observatoire
ou d’une structure indépendante d’analyse et d’information »
La
proposition de M. Fenech ne ressemble en rien à
celle du CICNS, qui a
été un pionnier dans l’élaboration détaillée d’un projet
d’observatoire réellement indépendant. L’observatoire de M. Fenech
serait une sorte de « super MIVILUDES
»,
un organe de répression composé exclusivement de personnalités
antisectes laïcistes,
comme l'indique son intitulé fumeux : « Programme européen d’études sur les dérives sectaires et leurs dangers
pour les Droits fondamentaux ». Une
étude incongrue du chamanisme « Force
est de constater que des dérives en matière de chamanisme existent.
Des témoignages le prouvent, des poursuites judiciaires ont déjà été
introduites en France et à l’étranger et trois signalements de faits
graves, parvenus en 2009 à la Miviludes, ont donné lieu à la saisine
des autorités judiciaires. »
Une grande partie de ce rapport est consacrée à
ce que la MIVILUDES présente comme une « étude de fond » sur le
chamanisme. Des dizaines de pages sont consacrées à la description de
ces pratiques dans divers pays du monde avec une tentative affichée
de respecter ces croyances (on trouve par exemple des passages aussi
étonnants, dans un tel rapport, que celui-ci : « Un
chaman, après une longue initiation, est en mesure de communiquer
avec les esprits. Il est ainsi chargé d’établir ce lien entre les
hommes et les esprits de la nature, pour le bien de sa communauté »).
De tels efforts de la part de la MIVILUDES seraient louables s’ils
n’étaient démentis quotidiennement par les actions de cette officine
qui affiche un mépris et une volonté de répression sans discernement
(ce qui signifie, pour être tout à fait clair, que si des dérapages
existent réellement, ils peuvent être pris en charge dans le cadre
des lois existantes, sans stigmatiser des courants particuliers).
Dans cette section surréaliste, un autre passage a attiré notre
attention. La MIVILUDES accuse en effet les médias d’être
responsables de la « banalisation
des dérives » : « (Ces
dernières remarques)
posent
le problème de la responsabilité de certains médias dans la
banalisation de dérives chamaniques, supposées sans danger puisque «
naturelles ». Il arrive que l’on puisse reprocher à la presse grand
public et aux médias audio-visuels une certaine négligence et un
manque de vigilance dans leurs reportages (p. 63) ».
Une façon de « cracher dans la soupe » quand on connaît l’usage fait
par la MIVILUDES du battage médiatique, dont ce rapport est un bon
exemple puisque les médias ont été les premiers à en connaître le
contenu, lui assurant ainsi une large couverture avant que des
organismes comme le CICNS puissent le commenter.
Toujours autour du chamanisme, page 92, le
rapport présente un tableau des plantes psycho-actives utilisées par
les chamans et, bonne surprise pour ceux qui n’aiment pas la
cigarette, le tabac est épinglé sous le nom scientifique
Nicotiana.
La culture du tabac devrait donc être rapidement interdite sur le sol
français puisque des chamans risquent de l’utiliser.
« Tout ce qui est naturel peut cacher des dérives sectaires »
Le rapport prend ensuite pour cible la
kinésiologie, le Mouvement du Graal, l’instinctothérapie, la
naturopathie, le végétarisme et, invention pour la circonstance,
« l’hygiéniethérapie », le tout mis dans un même sac, amalgamant
des mouvements spirituels, des thérapies, une alimentation
différente, des modes de vie. Sur l’exemple de la naturopathie, il
est intéressant de noter que la description qui en est faite est
globalement positive, avec des insinuations sur le risque potentiel
de ne pas utiliser les remèdes de la médecine conventionnelle.
Ce délayage continuel, tout au long de ce rapport, de faits positifs
avec des insinuations et des allégations sans fondement est une
marque de fabrique des récents rapports de la MIVILUDES. Le
rapport conclut d’ailleurs : « Cette présentation
place sans ambiguïté la naturopathie
dans les médecines alternatives ». Le simple fait d’être
une médecine alternative représente un danger. M. Fenech l’a
déclaré sans ambiguïté, en effet « Il
faut alerter l'opinion :
tout ce qui est naturel peut cacher en partie des dérives sectaires
(source) »
Le comble de l’hypocrisie
Après l’attaque des médias citée plus haut, vient ensuite celle des
Juges : « En préalable, il faut citer ici, pour mieux l’écarter
d’emblée, le mauvais usage qui est fait parfois par le juge de la
notion de « mouvement sectaire dangereux ». (...) Mais surtout, il
est regrettable que les juges se soient engagés sur ce terrain, à la
fois glissant et stérile, car d’une part, quelle est la légitimité du
juge pour décerner un certificat d’innocuité ou entériner la
dangerosité d’un mouvement, en se fondant au demeurant sur un rapport
parlementaire sans portée normative, et d’autre part ce seul élément
sans explicitations ne saurait justifier l’atteinte que le juge
estimerait devoir porter aux droits des parents en cas de « danger
». p190-191 ».
Que
des juges aient tendance à subir les battages médiatiques et
finissent par être sensibles à certaines thèses est une réalité que nous
avons déjà soulignée, mais que la MIVILUDES, qui a la plus grande
part de responsabilité dans la propagation des thèses liberticides les
plus révoltantes, se permette d’accuser les Juges d’une sorte de
dérive est à la fois comique et dramatique. Aucune mention des voix alternatives sur la lutte antisectes dans ce rapport
La
seule allusion se trouve dans cette phrase, au milieu d’un paragraphe
relatif à la présence de la MIVILUDES à l’OSCE : « Aux attaques de
certaines ONG concernant la politique de vigilance et de lutte contre
les dérives sectaires (reproches sur les subventions accordées aux
associations, action de la Miviludes, etc.), la délégation française
par la voix du conseiller pour les affaires religieuses, a justifié
l’attitude de la France, notamment en ce qui concerne la protection
des victimes. ».
Un compte
rendu très différent de notre propre constat.
Les
formations à risque
« Les formations »...
un thème récurrent pour la MIVILUDES. Le souhait affiché est d'« identifier les actions qui ne sont pas « formatrices » par nature,
repérer les pratiques qualifiées de « charlatanesques », voire les
dérives sectaires ».
Sont considérées à risque les formations sur les médecines
alternatives, le développement des capacités comportementales et
relationnelles, la psychothérapie, la recherche spirituelle, les
pratiques de médecines alternatives, les processus de
changement de l’individu, la connaissance et l’estime de soi, la
communication harmonieuse, la relation à l’autre (p 258). La liste
parle d’elle-même. Par ailleurs, on peut s’interroger sur la capacité de la MIVILUDES à dispenser une formation de qualité à tous ceux qu'elle prétend former, jusqu'aux « formateurs de la Fédération française de Yoga à Paris ». (p.290). Beaucoup de bruit pour rien
La MIVILUDES n’aime
pas beaucoup les chiffres, ni les statistiques, parce qu’elle sait
qu’ils
desservent
sa propagande (voir
le problème des chiffres lors d’auditions au cours de certaines
commissions parlementaires). « Afin
de refléter l’activité des juridictions pénales, en matière de lutte
contre les dérives sectaires, plusieurs dossiers d’action publique
peuvent utilement être évoqués ». Comme souvent, beaucoup de
bruit pour rien : deux seulement sont cités ! Mais la MIVILUDES
semble chercher à se donner une apparence de sérieux et de « raison
d’État » quand elle déclare
:« Il
convient de mentionner enfin notre activité constante de
collaboration avec les services de renseignement, d’enquête et
d’instruction, ainsi qu’avec les organes de la coopération
internationale. Cette dimension de notre mission ne peut être portée
à la connaissance du public que de manière générale et indicative. » Conclusion
sans surprise Si, afin de démontrer
notre impartialité dans l’étude d’un tel rapport, nous devions
trouver un point positif à souligner dans celui-ci, nous serions en
difficulté. Nous avons noté que les rapports de ces trois dernières
années, par le biais des « études de fond » (cette année
sur le chamanisme traditionnel), avaient un peu évolué en
comparaison des précédents qui pouvaient se permettre une approche
antisectes primaire. Mais force est de constater que ces belles
paroles, au ton « sociologique », constituent un maquillage officiel
de l’action réelle de la
MIVILUDES dont on peut trouver la nature véritable dans les propos
régulièrement médiatisés de son Président M. Fenech. La « mission »
maintient son approche répressive, ne reconnait pas ses erreurs (discriminations), ni
n'adopte une approche de
connaissance sur le sujet des « dérives sectaires ». Le laïus sur le
chamanisme traditionnel, dans le rapport de cette année, pour un
lecteur averti, n’est qu’une pauvre tentative pour atténuer
officiellement le violent laïcisme de cette mission d’État. Tous les
domaines montrés du doigt par la MIVILUDES, comme susceptibles de
dérives sectaires, correspondent à une demande croissante de la
population de trouver des solutions sur le plan éducatif,
thérapeutique, et spirituel à laquelle les structures en place ne
répondent pas. La détermination de la MIVILUDES à stigmatiser ces
alternatives reflète une volonté de détourner l’attention du malaise
général de notre société et de ses propres dérives.
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